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Ce qui freine le changement de palier vers de nouveaux équilibres

FunambuleJe concluais un précédent post  en écrivant qu’un ré-équilibrage durable ne pourrait pas passer par des stratégies de renfort ou de réduction de l’une ou l’autre des diverses dimensions et registres de nos systèmes, car de telles stratégies, en privilégiant en fait ponctuellement une dimension au détriment d’une autre, conduisent immanquablement à des oscillations des individus et des systèmes entre des mèmes du premier palier, sans pouvoir évoluer vers les mèmes du second palier, dont la caractéristique est de viser une intégration, un équilibre juste, de toutes les dimensions entre elles, non par priorisation momentanée de l’une ou l’autre, mais par recherche d’un équilibre systémique : Ainsi, le passage aux  mèmes de second palier est l’unique porte de sortie « par le haut » possible pour notre époque faisant face aux complexités grandissantes qu’elle a mises en place.

Seules des stratégies intégrales et systémiques, d’harmonisation des divers flux et dimensions permettant ce passage vers un nouveau palier et des nouveaux équilibres, il nous faut comprendre quels sont les freins qui empêchent ce passage.

  1. On se trompe de logique de référence :L’idée de compenser l’excès d’un élément par l’adjonction de l’élément manquant est adéquate dans une logique dualiste et linéaire, mais nous sommes depuis quelques décennies dans un cadre systémique et circulaire :  les recettes dualistes et limitées à une seule dimension, (le plus souvent la dimension économique) sont devenues causes d’effets pervers sur les autres dimensions (sociales, psychologiques, individuelles…) Et malheureusement, chercher à ajouter un peu de l’élément manquant vient en fait le plus souvent renforcer la résistance de l’élément en excès.C’est ainsi, par exemple, qu’en matière de résultats électoraux dans les démocraties occidentales, on assiste au « yo-yo » régulier entre partis dits conservateurs » et « progressistes », ou de droite et de gauche … Le balancier finit toujours par revenir de l’autre côté : on évite la chute que par un coup de balancier de l’autre côté…  Mais en fait, on n’interroge pas les véritables causes des déséquilibres, ou plus exactement, on s’évertue à maintenir l’équilibre sur le fil instable de nos systèmes, sans en revoir les ancrages et les modalités de fonctionnement !
  2. On n’accorde pas assez d’importance aux outils adéquats :La science , depuis Descartes, a considérablement décortiqué, structuré, rationalisé, la dimension du « Cela », et la logique cartésienne est devenue la norme. Pascal, arguant du fait que  « le coeur a ses raisons que la raison ne connaît pas » a été quelque peu oublié. Par chance, depuis la fin du 20ème siécle,  les dimensions subjectives disposent elles aussi de grilles de décodage, d’outils et de méthodes, de modalités posturales … Les sciences humaines se sont considérablement étoffées, et aujourd’hui, les neurosciences viennent complémenter leurs apports.Il y a suffisamment d’outils , approches , méthodes pour aborder les dimensions du « Je » et du « Nous » : les comprendre « de l’extérieur », les laisser émerger « à l’intérieur » , les accompagner, voire les piloter …Mais le manager du 20ème siècle n’avait guère besoin de ces outils là : son charisme, ou son exigence lui suffisaient ! Le manager du 21ème siècle est un peu plus démuni avec ces deux seuls aspects  et il lui faudra sans nul doute se pencher sur ces nouveaux outils : Nous sommes là devant un enjeu important pour les espaces de formation des managers et décideurs de demain.
  3. On néglige  certaines réalités psychologiques :S’agissant de dimensions subjectives, si l’on néglige certaines mécaniques spontanées, on s’expose au débordements inconscients et incontrôlés, ou à l’inefficacité. Pour mieux les prendre en compte il existe  trois directions, qu’il faudra emprunter impérativement toutes les trois :

– Les comprendre : d’innombrables approches , grilles, théories se bousculent : devant ce foisonnement, la difficulté est de trouver quelques grilles de lecture pertinentes,  simples mais pas simplistes, opérationnelles dans la pédagogie et dans le quotidien ; et si possible, recevables par les différents courants frères mais néanmoins ennemis des  disciplines des sciences humaines auxquels elles appartiennent  :   Celles que j’ai sélectionnées satisfont à ces critères, mais rien ne dit que je n’en rencontrerais pas d’autres encore plus pertinentes.
– Les vivre : entre comprendre et vivre la marge est immense : Comprendre les dimensions du « JE » et du « Nous » n’est pas les vivre.  Il est un cheminement intérieur qui n’appartient pas à la connaissance  :  émotions et sentiments, dimension symbolique et ou archétypale, créativité et imaginal, intuition, rêves , dimension spirituelle … le monde du cerveau droit est d’une richesse infinie qu’il faut plus d’une vie pour le parcourir et l’apprivoiser …

Si la maturité, le niveau de développement, la richesse d’un individu seront intimement liées au chemin parcouru dans ce monde là, seuls les espaces tenant à la dimension émotionnelle seront vraiment indispensables aux managers de demain.

Cerveau gauche , cerveau droit : cette distinction n’a plus de secret pour le manager moderne… Les deux points précédents concerne ces deux aspects.

– Les réguler :   Par contre , bien que les mots soient d’usage courant , on ne met pas souvent en oeuvre un réel apprentissage et entrainement à développer l’usage des » instruments de l’homme debout »  que sont la conscience , et l’énergie :

Réguler les « productions psychologiques » n’est pas une fonction spécifiquement cerveau droit ou cerveau gauche : c’est une « méta-fonction » : La conscience en a la charge … (La zone de la conscience est d’ailleurs située en haut du cerveau)… Si « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme », émotion, intuition, sensation  sans conscience ne valent pas plus ! (j’ai consacré deux ouvrages à ce sujet de la conscience…je ne m’y étends pas plus ici !)

Accorder  consciemment plus ou moins d’intensité à l’une ou l’autre des fonctions psychiques (raison, intuition, émotion, sensation, conscience) est également un apprentissage plus qu’utile : Piloter les énergies est pratiqué depuis des millénaires par certains orientaux, mais nous en sommes encore aux balbutiements en occident.

4. Les choix pédagogiques renforcent le symptôme :

Dans le domaine de la formation et de l’accompagnement, les nécessités pédagogiques conduisent souvent à aborder séparément ces dimensions, alors qu’au quotidien elles sont intégrées (Se jouent en même temps, en « direct live »)

S’il existe évidemment des interventions recouvrant les deux dimensions, ces dernières sont rarement travaillées en même temps : temps d’apport, d’échange, de jeu, d’expérience, de simulation, de debriefing, ou d’étude sur document sont séparés…  De plus la capacité limitée de « conscience contuitive »  du participant lambda n’autorise pas vraiment un travail simultané  sur l’apport, l’expériencié- le ressenti, le  conscient, et le décodage ! Il est donc normal que ces temps se succèdent.

De ce fait, si l’on parcourt toutes les dimensions séparément, on active séparément les zones du cerveau y afférant, et les connexions ne s’installent pas : revenu dans un cadre et un environnement quotidien, les anciens automatismes seront activés d’autant plus facilement selon que l’environnement externe y contribuera ou non.

On aura augmenté le nombre de ressources à sa disposition, ce qui est déjà un pas, mais il sera difficile d’activer plusieurs de ces ressources en même temps, alors que c’est ce qui serait nécessaire.

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