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Libéralisme et dictature de l’argent : Une confusion dangereuse.

le-cerveau-est-plus-puissant-que-l-argent-32622728Dans un article « carte blanche »  paru dans « Le Soir », média belge, Mme Manuela Cadelli, Présidente de l’Association syndicale des magistrats (belges) considère que « le néo-libéralisme est un fascisme » : Cet article a généré un certain nombre de réponses et réflexions … La mienne évoque les effets pervers possibles d’une « bien pensance » qui, tout en se voulant humaniste, se fait inconsciemment complice d’un fascisme qu’elle entend dénoncer.

Mme Cadelli fonde sa pensée sur une louable sensibilité aux effets néfastes de l’hypercapitalisme et de la toute puissance de l’argent … Mais, voit-elle qu’en employant mal à propos un concept qui n’a d’existence que dans les représentations « communes » (le « néo-libéralisme » ) et en inversant la définition du fascisme, elle nourrit en toute bonne foi l’hydre noire qui grignote peu à peu les libertés de chacun ?

Après tout, si le « néo-libéralisme est un fascisme » , ça doit bien être parce que le libéralisme y prédispose  : La dérive liberticide n’est dès lors qu’à un pas !

Mme Cadelli, en sa position de magistrate, se devrait d’être plus attentive au sens et à l’emploi des mots, à moins qu’en sa position syndicale, elle ne serve, plutôt que les valeurs de justice, des visées plus politiciennes ? Chacun peut mesurer, dans l’histoire et l’actualité, les pratiques des états socialistes en matière de libertés … Vous me direz, à raison, qu’on peut également mesurer en matière d’égalité et de fraternité les effets des états où le capitalisme règne en maître !

Alors, la régulation économique par les lois du marché n’ayant visiblement pas de meilleurs effets que la régulation par les camisoles légales, administratives, et fiscales, peut-être serait-il temps de se pencher sur d’autres modes de régulation : Et si on s’occupait un peu d’ouvrir et d’éclairer les consciences ? Après tout, ce ne serait que le véritable début des « lumières », dont le libéralisme économique, aujourd’hui très mal compris et caricaturé, n’était qu’un des piliers.

Toute représentation, tout choix, toute orientation politique, économique, judiciaire, contient en elle-même sa lumière, et son ombre, dont les excès seront les manifestations. Un libéralisme sans responsabilité individuelle n’est pas plus équilibré qu’un collectivisme sans libertés ! Malheureusement, en se voulant porteur de lumières, l’article de Mme Cadelli n’est pas exempt d’une plus grande part d’ombre en perspective !

Le concept de « néo-libéralisme » tel qu’il est devenu courant de l’employer vise plutôt « l’hyper-capitalisme » , et la financiarisation à outrance, y compris celle qui conduit à mettre les états sous la coupe du système financier. Ces deux aspects n’ont rien à voir avec le libéralisme. D’ailleurs, M. Cadelli rappelle la filiation du libéralisme avec les lumières.

Qu’il faille s’alarmer de toutes les conséquences des dévoiements des principes libéraux par des egos insatiables est une évidence. Mais en collant l’étiquette libérale à ce qui ne sont que des égoïsmes au service des puissants (qu’ils soient ceux de l’état ou de la finance) on confond un concept politique et philosophique fondateur de l’idée républicaine, avec une  dérive psycho-sociologique propre à tous les systèmes quels qu’ils soient : La dictature de l’argent  !

Sans doute est-ce ce que Mme Cadelli veut dénoncer, mais, ce faisant, elle opère une inversion sémantique dont les conséquences sont graves : Le fascisme, ce n’est pas quand une idéologie domine tout, y compris l’état, mais quand l’état domine tout, y compris les idées et la libre pensée.

Les intentions humanistes de son article sont louables, et la « pensée sensible » qui en est le moteur est salutaire … Mais les raccourcis et approximations qu’elle commet en tout bonne foi conduisent à justifier, sous couvert de « démocratie », une intervention étatiste encore plus grande : En fustigeant ce qu’on nomme à tort le « néo-libéralisme » , on dénigre par capillarité le véritable libéralisme, qui pour préserver les équilibres, suppose des outils de régulation des excès, d’éducation, de recadrage qui veulent aussi préserver les libertés … Le problème de la pensée sensible est qu’elle ne mesure pas que ses bonnes intentions deviennent des principes qu’il faudrait appliquer « de force » à tout le système : C’est ainsi que tous les états dits « socialistes » sont devenus en fait plus fascistes que les états libéraux !

La sur-administration qui s’en suit devient peu à peu, sûre de son bon droit, car fondé sur des « bonnes intentions de principe » , la pire des camisoles anti-libertés : Il suffit d’observer ce qui se passe depuis quelques temps …

En se trompant de mots, on se trompe d’ennemis … Le grand public fait dorénavant l’amalgame entre « néo-libéralisme » et « libéralisme » … Ceci est bien pratique pour faire passer des pilules liberticides, et donner à l’état et l’administration tous les pouvoirs. (avec une bonne dose sécuritaire histoire que ça passe pour un vaccin nécessaire contre le mal qui nous guette).

Le nécessaire combat humaniste est nécessairement à visée de liberté : (Et donc … libertaire ? Libéral ? … ) … Et, puisque les dynamiques de l’ego poussent beaucoup vers l’excès individualiste, le rôle de l’état est d’en réguler les dévoiements : Ce n’est pas en réduisant les libertés de tous qu’il y parviendra, car cela ne peut que conduire,mécaniquement, au fascisme, dont je rappelle qu’il fut toujours, au début, celui des « bien pensants » … mais en éduquant à la responsabilité individuelle envers les équilibres … ce qui passe par l’ouverture des consciences.

Jeter le bébé libéral avec l’eau du bain hyper-capitaliste et des connivences politico-médiatico-financières, c’est participer en toute bonne foi, à l’émergence des futurs fascismes, tout en pensant les combattre.

Les lumières n’ont pas failli en appelant à la liberté : Mais les successeurs ont failli en négligeant l’aspect essentiel d’un nécessaire corollaire : la Fraternité ! Quant à l’égalité ... Voir cet article sur ce blog

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