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Apparences Trumpeuses : Un Mâle pour un Bien ?

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Derrière ce titre un brin provocateur loin de moi l’idée de défendre l’homme qui vient d’accéder aux plus hautes fonctions de l’état américain sans me monter lucide sur ce qu’il représente.

Mais, en étant tout aussi lucide sur ce qu’aurait signifié l’élection de Mme Clinton, on peut raisonnablement se demander si cette élection ne serait pas un mal pour un bien ?

En effet, Hillary Clinton élue, les masses « bien pensantes » auraient-elles manifesté avec autant de fougue leur refus des idées et projets les plus néfastes des intérêts qu’elle représente ?

  • Qui aurait interrogé les racines et les intentions d’une politique internationale américaine qui aurait suivi les mêmes voies guerrières et hasardeuses ?
  • Aurait-on cherché à analyser le poids de l’image médiatique auprès des « électeurs de base »  (Ambianceurs : 1  / Politiciens : 0 !) ?  Aurait-on commencé à analyser de manière un peu plus complexe le rôle des médias dans le façonnage de l’image des candidats ?
  • Aurait-on interrogé leurs pratiques à la solde consciente ou inconsciente de divers lobbies, ou le remplacement d’un journalisme d’analyse par un journalisme d’opinion ? (Il semble que dorénavant, être le candidat des médias devienne un handicap plus qu’un atout : Serait-ce que « le peuple » est moins docile que certains voudraient l’espérer ? – ou mieux informé ? )
  • Aurait-on remis en question les effets pervers du système électoral américain, faisant une fois de plus outrage à la majorité des voix pour retenir la majorité des grands électeurs ?
  • Qui serait descendu dans la rue pour montrer son rejet de toute haine, racisme ou xénophobie, sexisme,  ou vision simpliste ?

La surprise a ceci de salutaire qu’elle génère une prise de conscience plus visible que d’habitude de ce à quoi ont mené les fonctionnements économiques, politiques, médiatiques : Elle laisse un peu de place à l’expression de ceux qui depuis longtemps analysent les déséquilibres qui mènent peu à peu le monde au chaos et clament l’urgence d’y faire face autrement.

Je vois une nouveauté dans le fait que certains journalistes occidentaux reconnaissent s’être trompés, et avouent n’avoir pas été en contact avec les vraies réalités du terrain, et donc suffisamment attentifs aux tendances commençant à gronder sournoisement. Ce « mea culpa » permet de renvoyer -une fois de plus –  les médias et les politiciens « mainstream » à leurs insuffisances.

Sauront-ils, de même que chacun de ceux qui poussent des cris d’orfraie, dépasser le moment de stupeur, et passer à de nouveaux comportements ?  Malheureusement, un certain nombre de dynamiques psychologiques, individuelles ou collectives ne se laissent pas aussi facilement contourner : Ceux qui croient que « le changement, c’est maintenant » en savent quelque chose !

Et – je parle d’expérience – rares sont ceux qui sont prêts à se donner le temps de mieux comprendre les ressorts de ces complexités subjectives, et à faire l’effort d’acquérir les outils et moyens de solutions plus ajustées : Par chance, la vie elle-même se charge d’apporter les circonstances  qui mènent peu à peu à un changement de paradigme : Cette élection en est une !

Car si l’on ne peut nier que certains électeurs de Donald Trump soient de fieffés ignorants, racistes, xénophobes, ni que M. Trump lui même ne présente ni les caractéristiques d’un humanisme bienséant, ni celles d’une juste mesure dans les paroles et les comportements, ce serait se fourvoyer de penser que près de 50 % des électeurs américains puissent être nécessairement du même tonneau !

La surprise de cette élection a le mérite de soulever un vent de questions pour le moins fondamentales chez ceux qui se sentent orphelins de leurs valeurs humanistes dans ce choix pourtant « démocratique » …  Reste à espérer que ce vent qui se lève ne soit pas qu’un feu de paille et que ces questions fondamentales deviennent fondatrices de nouveaux engagements : Non pas rebelles ou destructeurs, mais impliqués et constructeurs !

Cette construction-là ne saurait être de mots jetés en l’air pour manifester sa colère ou sa déception, ni d’oppositions stériles à une réalité qu’il faudra bien affronter lucidement ! Elle appartient à chacun dans le quotidien de ses actes, parfois même les plus insignifiants, dans les sphères privées ou professionnelles qui sont les siennes.

Mais, que diable, restons lucides : Cette vague de fond ne surgit pas seulement du néant des ignorances et de la bêtise citoyenne!

De nombreux critères justifient un vote affectif, « de rébellion », motivé par la rancoeur envers le système devenu fou ou envers les conséquences d’un néolibéralisme incapable de s’autoréguler ; et d’autres justifient un vote rationnellement fondé :

Par exemple, à titre personnel, j’ai tendance à préférer voir à la tête de la première puissance mondiale un homme prêt à s’entendre avec la Russie, plutôt qu’une femme prête à  s’y opposer à tout prix, y compris celui de la guerre, pour défendre des intérêts inavoués, camouflés derrière l’étendard des grands principes démocratiques ! Après tout, le manque d’éducation, le machisme, et la xénophobie d’un homme, son « populisme » et sa « bouffonnerie », ne seraient-ils pas préférables à la perspective d’un conflit mondial, possiblement nucléaire, auquel aurait pu rapidement mener la logique –connue et documentée–  de son adversaire féminine ?

Bien sûr, ce vote signe en partie un retour en arrière, une régression vers des tendances antérieures aux stades  rationnels et sensibles : Incarné par les facettes conquérantes, moralisatrices, machistes, et fanfaronnesques de M. Trump …

Mais il est ainsi l’occasion d’une prise de conscience par certains « bien-pensants » que certaines limites ont été dépassées : Un peuple vient de dire « trop, c’est trop ! » : Quoi qu’on pense du choix qui en résulte, les motivations qui y ont mené sont bien plus complexes et variées que la caricature qu’on est prompt à s’en faire.

L’habitude de juger en mode binaire (bien ou mal) conduit beaucoup à tomber dans le piège d’une réaction émotionnelle outrée (ou dépitée), et à vilipender le résultat de cette élection :

Si l’on veut éviter ce genre de mésaventure en d’autres territoires, plutôt que de se lamenter au nom des grands principes, il serait temps de prendre conscience des mécanismes des complexités subjectives qui sous-tendent le chaos de l’époque !

Que ce soit par les conséquences d’un néolibéralisme mondialisé sans limites, qui n’est qu’un impérialisme économique paré dans les atours de la démocratie, ou que ce soit par les risques d’un retour de vieilles lunes xénophobes, d’un côté ou de l’autre, c’est le « vivre ensemble » qui est impacté :

Et si l’on se posait les bonnes questions quant aux causes, tant individuelles que collectives, tant psychologiques qu’économiques,  de ce « mal à vivre ensemble »  ?

Et si on envisageait d’autres solutions que le maintien dans la peur à grand renfort de besoin sécuritaire, dans le découragement à coup de taxes et impôts confiscatoires; dans la soumission par le truchement d’une sur-réglementation galopante ?

Quand l’inconscience d’une caste dominante, sa persistance dans ses excès ou ses erreurs, son mépris voilé, voire son arrogance pour le « vulgus pecum » finissent par emplir la coupe de l’insatisfaction et de la colère,  la rancoeur n’est pas loin …  Et la rébellion en est la fille  !

Pour ceux qui ne le sauraient pas, la destruction rageuse est quant à elle fille du désespoir, qui est le sentiment que la rancoeur nourrit peu à peu :  A bon entendeur …  !

Mais qui entendra ? C’est connu , l’être humain ne change généralement que quand il s’est pris le mur en pleine face !

Je ne résiste pas à sortir une fois de plus de mes cartons quelques extraits de mon ouvrage « La Démocratie Malconsciente », écrit en 1991.

Non que cela me réjouisse de pouvoir penser un « je vous l’avais bien dit »  qui n’aura de toutes façons aucun autre effet que montrer mon dépit d’avoir une fois de plus eu raison trop tôt …  Mais c’est surtout,  qu’ayant  depuis cette époque quelque peu avancé dans ma compréhension et les outils avec lesquels j’interviens en tant que consultant, formateur ou conférencier, j’espère qu’un lecteur ou deux se diront : « Puisqu’il a su anticiper en 1991 ce qui survient 25 années plus tard, faisons appel à lui pour entendre ses analyses d’aujourd’hui ! » …

(Oui, je sais, je rêve encore !)

 » La montée des corporatismes et de l’individualisme risque de subordonner l’obtention d’une majorité à des promesses que l’on sait vaines et irréalisables, mais que l’on répand sans vergogne tout en attisant les mécontentements envers le camp qui est au pouvoir.

A ce petit jeu, la seule majorité qui risque de se dégager sera celle, au mieux des abstentionnistes, au pire celle des partisans d’un ordre fort, emmenés par un leader démagogue incarnant les vertus traditionnelles et les valeurs sûres de la nation.

 A cet égard encore ceux qui ne se penchent pas sur l’histoire risquent fort de la voir se pencher sur eux… Faudra t’il alors accepter selon les principes de la démocratie “ces tendances qui se révèlent avec plus de force parce que ralliant un plus grand nombre de partisans ou soutenues au départ par des gens à convictions plus ardentes”.

Messieurs les politiciens, la qualité de la survie de votre catégorie dépend de votre capacité à vous remettre en question, à retrouver l’intérêt général, à vous mettre à la tâche en ne laissant pas vos querelles de clocher et votre intérêt personnel l’emporter sur les enjeux, à vous inter – dire, et à nous apprendre l’inter – diction...

 Ecole, entreprise, ville, médias, organisation politique… N’attendez plus que les changements viennent d’eux-mêmes: Il vous faudra légiférer, et commencer par ce qui vous concerne, car sinon la confiance du peuple vous fera toujours cruellement défaut, et aucun gouvernement, quelle qu’en soit la forme et les méthodes, n’a duré bien longtemps sans la confiance des gouvernés.

 Accessoirement, la qualité de notre vie en dépend également, mais je n’aurai pas la naïveté de croire que vous en soyez tous unanimement préoccupés … »

(…)

Poursuivant mon analyse j’écrivais quelques lignes qui pourraient faire écho au mea-culpa des quelques journalistes contrits de leur erreur :

 « Il m’apparaît utile de revenir aux fondements même de nos démocraties, afin de voir si ces fondements n’ont pas subi des altérations qui expliqueraient la difficulté à trouver les solutions. La difficulté à réussir le mets attendu ne vient peut-être pas de la recette, mais de la qualité des ingrédients.

L’erreur en la matière est peut être de supposer que nos prémisses sont bonnes, qu’elles sont la vérité et la réalité, et d’essayer à tout prix d’ordonner les choses en accord avec elle. (Voir  P.Watzlawick, in « Changements, paradoxes et psychothérapies »).

En adoptant certains fondements les démocraties ne sont elles pas tombées dans le piège utopique ?  Ou n’avons nous pas détourné certains de ces fondements de leur sens premier ?

Il s’agirait alors de reconnaître “la cassure entre ce que les choses sont en réalité et ce qu’elles devraient être d’après une certaine prémisse.

Il est des cas où la réalité peut être modifiée, d’autres où on ne peut rien faire pour changer l’état réel des choses: Dans ces derniers cas, si on se tient fermement à “ce qui devrait être”, on essaiera d’effectuer un changement là où  il ne peut avoir lieu. Le problème n’est pas la manière dont les choses sont réellement, mais la prémisse selon laquelle elles devraient être d’une certaine façon”.

(…)

Aujourd’hui, j’étayerai mon argumentation ainsi :   Une fois dépassé le stade pulsionnel (instincts, image fantasmée du réel, désir d’expansion, de possession et de conquête) l’humain arrive (en principe) au stade de la pensée : Celle-ci comporte 3 modes : la pensée morale, la pensée rationnelle, la pensée sensible, qui eurent tour à tour leur heure de gloire :

De la pensée morale naquirent les régimes monarchiques ou absolutistes, la pensée rationnelle, déesse du siècle des lumières engendra nos démocraties technocratiques, et la pensée sensible nourrit les désirs actuels d’une démocratie plus participative, pluraliste, relativiste …

Quand la pensée émerge, ce ne sont plus les pulsions, forces inconscientes du vivant qui  qui sont sensées piloter nos actes. Mais il reste quelques problèmes de taille :

Le premier est que nombre d’individus, y compris chez les puissants, restent mus par leurs pulsions.

Sans doute M. Trump donne t’il cette impression, ce qui explique le discrédit dont il fait l’objet chez une majorité de « bien pensants »  : Stratégie de marketing à destination d’un électorat peu connu pour la profondeur de sa pensée, ou réalité psychologique du personnage ?

Le second problème, c’est que certains « pensants » (moraux, rationnels , ou sensibles) perdent le contact avec le pragmatisme et les réalités du terrain, et les « Forces du Vivant » … Leurs grands principes viennent prendre le pas sur la réalité, notamment celles de la nature humaine !  …

La pensée en vient à vouloir que la réalité corresponde aux principes qui la fondent :

Soit principes moraux : Ce qui est « bien » devant alors éliminer ce qui est « mal » – sachant que le mal est tout ce qui est étranger (à ma culture, à mes valeurs ou principes, à mes frontières , à ma religion, où à ma couleur de peau …)

Soit principes rationnels, sous couvert d’approche « scientifique », ou de « saine gestion économique » …

Soit principes sensibles : Les droits de l’homme, ou des animaux, la démocratie , l’égalité , ou autres … devenant alors des bannières, fort légitimes certes, mais qu’on peut estimer sujettes à caution dès lors qu’elles se targuent d’universalisme et transforment leurs adeptes en inquisiteurs, formatés par leur pensée unique et manichéenne.

Démocratie bien ordonnée commence par soi même !

Le temps semble enfin venu d’un regard moins simpliste, ouvert à la complexité, et surtout d’un accent à mettre sur une réelle conscience des réalités de nos sociétés, et du vécu quotidien de leurs citoyens lambdas, parfois décourageant, si ce n’est désespérant …

Ce vote résonne des voix de ceux qu’on n’écoute pas …  De ce côté de l’atlantique, le mégaphone par lequel ces voix là s’expriment a déjà émis quelques avertissements : On attend le raz de marée, où on se bouge les fesses avant de se les faire botter ?

Il est largement temps d’ouvrir et développer les consciences (pas les intelligences !) :

Après le stade des pulsions, après celui des pensées, doit venir celui de la conscience du réel dans toutes ses dimensions, objectives et subjectives.

Cette perception claire et lucide des réalités doit prendre le pas sur l’émotion, sur les rationalisations sans coeur, et sur les grands principes dans lesquels il faudrait faire entrer la réalité des complexités humaines …  A ce stade, « le réel commande, et la conscience ordonne »  :  Les grands principes restent à leur place de lumière pour un cap à suivre …

Qui néglige la force des courants risque de se fracasser sur les écueils !

Et qui ne voit pas que ses galériens en ont assez de ramer s’expose à se faire débarquer !

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